Cinémoi
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"Mais il ne sait point que les morts sont là..." (Proverbes 9 : 18). Cette citation biblique revint en mémoire à Gabriel alors qu'il redescendait de chez les Caseneuve après avoir refusé poliment l'invitation à dîner de Drissa. Les affirmations extravagantes du père de Drissa auraient pu prêter à sourire. Mais la peur qu'il avait ressentie ne trompait pas. Quelqu'un, ou quelque chose, lui avait foutu la trouille de sa vie, Gabriel en était persuadé. Et le fait qu'il soit antillais, donc réceptif aux manifestations surnaturelles de toute sorte, n'expliquait pas tout, loin de là. A priori, le Poulpe était plutôt du genre sceptique, surtout à propos de ce qui prétendait sortir des fosses en marchant. Agnostique convaincu et matérialiste invétéré, sa culture zombiesque s'arrêtait aux films d'horreur américains, dont il ne raffolait pas mais qui l'amusaient plutôt. Il avait même visionné en cassette le premier et mythique film du genre sorti en 1932, White Zombi, avec Bela Lugosi, au grand dam de Cheryl qui préférait nettement les comédies sentimentales dans lesquelles figuraient ses stars préférées, Marilyn Monroe, Elsa Martinelli et Michèle Pfeiffer. D'après ce qu'il en savait, les zombis de la terrifiante légende haïtienne étaient des morts arrachés à leur tombe et rendus à un semblant de vie par l'action d'un sorcier. On disait qu'ils n'avaient pas d'âme et qu'ils étaient souvent employés comme main-d'œuvre dans les exploitations agricoles. Le cinéma en avait fait des bouffeurs de chair humaine, tel qu'on pouvait le voir dans la non moins célèbre Nuit des morts vivants. Si le Poulpe était quasi persuadé que Kamel et Djaoud n'étaient pas morts d'une banale overdose, il n'était cependant pas près de les imaginer rôder les bras tendus et l'air hébété en plein Paris. Il y avait forcément une explication à ce qu'avait vu ou cru voir Joseph Caseneuve. À lui de la trouver... Une lune pleine et ronde brillait sur le quartier, d'un éclat presque surnaturel... Le Poulpe se moqua de sa propre réflexion, enfonça les mains dans les poches de sa parka et se mit en quête de ce qu'il cherchait. |