Au clair de la lune...

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Comité poulpien : qui se cache derrière ?

Mise à jour :
6 mars 1999

Philosophie








Gabriel se considérait comme un être libre, malléable et contemporain. Il croyait ne croire en rien mais il trouvait sans cesse des motifs pour alimenter une colère viscérale qui, convenablement orientée, lui fournissait toujours de nouvelles raisons d'espérer.
Ennemi de l'analyse et de toute ratiocination visant à jeter le trouble sur un postulat libertaire franchement basique : les hommes naissent libres et c'est après qu'on commence à les faire chier.
(4)

On comprend mieux pourquoi il prend la route pour rendre sa justice à lui et tenter d'élucider des mystères qui ne font tiquer que son cerveau mal tourné :
J'ai pour l'instant quelques énigmes à résoudre. Pour rien. Pour tenir la route avec ma conduite intérieure. Parce que je ne peux pas faire autrement. Parce que je n'arrive pas à fermer ma grande gueule quand j'aurais mille fois intérêt de la fermer. Parce que je ne vais pas me laisser arracher les couilles sans rien dire. Parce qu'une fois qu'on m'a fait sortir de ma coquille, j'y rentre pas facilement. Pas avant d'avoir achevé mon pensum. Parce que... Parce que... Est-ce que je sais moi pourquoi ? Nom de Dieu. (44)

Au lieu de ronéoter des tracts sur une machine à alcool, de se coucher devant les cortèges présidentiels, de faire signer des pétitions le dimanche au marché, d'ouvrir un site Internet (sic !), Gabriel bouclait son sac. Menant des expéditions de fortune, il s'en allait redresser quelques torts qu'ensuite la foule du siècle raplatirait dans son dos, distraite, en remplissant son caddie. (54)

Maintenant, Gabriel déambulait à la périphérie de la comédie humaine. Une sorte de banlieusard qui regardait du coin de l'oil les coquins en action. Seulement de temps en temps, il intervenait. Pour décocher une mandale quand ils abusaient un peu trop de leur pouvoir. Plus simplement, quand les choses le chiffonnaient vraiment. Alors il se payait sur la bête. (44)

Ce qui n'empêche pas les jours de doute :
Ils ne passaient pas leur temps à fouiner dans les poubelles sanguinolentes de l'histoire, eux ne jouaient pas les explorateurs et redresseurs de tort à la petite semaine. Alors que lui... Profession ? Zorro. "Ridicule ! J'aurais dû devenir imprimeur, comme mon père ou quincaillier comme tonton Emile, songea l'enquêteur amateur. Mais l'activisme débridé c'était quand même autre chose que de vendre des moulinettes et des tourniquettes pour faire la vinaigrette, sans parler des ratatine-ordures. Les grandes idées et les petits coups foireux, c'était ça vivre ! Imbécile !" Il se serait giflé. (94)

"Je jugeais le monde et les gens avec un barème de valeurs et des critères fâcheusement artisanaux et ce n'était pas un hasard si mon QG et toute ma vie parisienne était dans ce 11ème arrondissement d'ébénistes, de robinetiers et de plombiers zingueurs. J'étais en rogne contre l'ordre établi mais j'étais foutrement conservateur et réactionnaire, tout au fond." (20)

Il sentait les emmerdements arriver à grands pas et détestait rentrer dans une histoire qui n'était pas la sienne. Mais les mouvements extrémistes, intégristes et intolérants l'insupportaient plus que tout et l'idée d'être le laxatif de quelques pontes le réjouissait. (103)

Pas d'attaches, pas de mômes. Pas d'adresse fixe non plus.
Sa seule base arrière était Cheryl, si l'on pouvait dire."(1)

Parfois, Gabriel fait preuve d'une lucidité rassurante, se qualifiant de "lourdaud libertaire affligé d'une hypertrophie de la glande donquichottesque". (4)

Pour J.-B. Pouy, le Poulpe n'en est pas moins "tout le contraire de l'exécuteur sans âme, avide de violence".

Ses opinions politiques ne se lisent pas sur son visage, plutôt sur... son bras :
"Un A entouré d'un cercle tatoué sur le biceps gauche". (9)

"Je travaille seul. Ni dieu ni maître". (8)

"Anar, esthète, jouisseur et libre penseur s'il te plaît, mais gauchiste, non ! T'as deux décades de retard p'tit mec". (9)

Les staliniens, anciens, nouveaux, rénovés, reconstruits, déconstruits, repeints, remodelés, déguisés en instituteurs socialistes, en nains de jardin rigolards et rassurants, il n'avait jamais pu les voir en peintures, fussent-elles signées Picasso. (94)

Parfois il envie à Cheryl sa capacité à flirter éternellement avec l'adolescence, encore mieux que lui-même. (69)

Quant à Dieu...
Les amis de mes amis sont mes amis. Les amis des curés sont mes ennemis. Les blablateurs sont les amis des curés ou des politiques. Idem.

"J'aime pas les curés, j'aime pas les capitalistes, j'aime donc pas les capitalistes curés ni les curés capitalistes. Et j'aime encore moins les journaleux qui essaient de faire du fric avec le scandale, le sexe et la suspicion. Les choses doivent être nettes : si on doit se débarrasser des curés, c'est parce qu'ils nous gonflent avec leurs croix et leurs miracles mais on doit les affronter de face, dire ce qu'ils sont. Pas jouer avec le goût salace d'un public dégueulasse, prêt à envoyer au bûcher la première sorcière."
(93)

Gabriel Lecouvreur n'aime pas les églises, il y voit toujours défiler les siècles et les bûchers, il y entend la voix éraillée de Torquemada et les hurlements d'horreur de la Saint Barthélemy. Il s'y sent mal, dans ces sinistres nefs de pierre. (145)

Ce n'est pas un feignant, simplement il a sa philosophie de vie, il essaie de s'y tenir :
Gabriel déteste travailler. La détestation pure et simple du travail étant une des opinions anarchistes qui lui restent de sa jeunesse au front de toutes les libérations. La fin - la mort - du travail, de l'esclavagisme pour trois francs, une opinion que Gabriel professe, défend corps et âme réunis, profère et mène à bout. C'est un vrai projet. (59)

Il préfère émerger vers dix heures, pas avant, voire à midi, oui midi pile voilà une heure chrétienne pour sortir du lit. (59)

Le Poulpe ne s'y ferait jamais. Ressources humaines : merde, cent ans de lutte quotidienne pour en arriver là, bonshommes et bonnes femmes ravalées au rang de matières premières. (105)

Mais bordel de céphalopodes à poil ras, l'aventurier des temps modernes, ce n'est pas l'explorateur, le détective ou le père de famille, c'est le salarié. C'est lui le desperado. Lui seul risque de perdre son emploi. (20)

Détaché, le Poulpe n'a "ni carte d'électeur ni sécu". (31)

Gabriel Lecouvreur existait sur un acte de naissance à la mairie du 11ème, et aussi sur un diplôme discutable, mais, pour le reste, l'ordre public avait dû faire sans lui. (58)

Repéré aux RG comme "empêcheur de boucler en rond des dossiers brûlants, comme piétineur de plates-bandes de l'Intérieur , et pour quelques autres broutilles fiscales qui en découlent. " (9)
Extrait d'une note de synthèse du groupe ROMERO sur Gabriel, "ce n'est ni un vengeur, ni le représentant d'une loi ou d'une morale, c'est un enquêteur un peu plus libertaire que d'habitude, révolté contre la vacherie du monde". (31)

Comme on peut le deviner à l'énumération de ses identités multiples, le Poulpe connaît aussi du beau monde.
On l'a surpris dans un épisode laisser le message suivant sur la boîte vocale de Gérard Lefort, critique à Libé : "Gérard j'ai les cassettes... A demain". (31)

La question que l'on peut se poser à la lecture de ses aventures, et nous savons que vous vous la posez, c'est comment Gabriel fait-il pour vivre?

Gabriel n'était pas payé pour avoir du résultat. Payé, il ne l'était même pas. Il tentait le diable, c'est tout. Si le diable planquait trop ses cornes, Gabriel passait la main, mais s'il parvenait à lui attraper son pied le plus fourchu, la bataille devenait rude, et la récompense était une petite victoire sur l'adversité. (1)

Pour se maintenir à flot, on sait aussi que le Poulpe vit des restes d'un petit héritage (41) et de quelques SICAV placées par son oncle (31).

Cependant, l'argent n'a pas l'air d'être son carburant de vie. Il s'en sert essentiellement pour son avion-chéri.
A part ça, il avait mis la main sur un joli magot, ce dont il se fichait éperdument puisqu'il avait de quoi vivre frugalement et qu'il n'avait jamais laissé le superflu parasiter son nécessaire. (28)

Il en profite pour en faire profiter quelques associations :
Une petite fortune pour lui. Et sans doute pour beaucoup.
Il en avait déposé l'essentiel chez Pedro, en attendant de savoir à quelle organisation antifacho il allait pouvoir en fourguer une partie.
(95)

Le Poulpe aime l'alcool, ça on le sait, mais il ne refuse pas une petite clope de temps en temps.
Il se disait fumeur occasionnel, et il l'était. Il pouvait rester plusieurs mois sans fumer, puis soudain il éprouvait le besoin d'acheter un paquet de Drum et de Rizla Croix. Souvent plus pour avoir l'impression de faire quelque chose de ses dix doigts. Il mettait un temps fou à la rouler, bien tassée, peut-être trop, car il avait un mal fou à tirer dessus. (65)

Et pour le reste, voici sa théorie :
Moi, Gabriel Lecouvreur, si je ne suis pas particulièrement fumeur de bonne drogue, ma solidarité est sans faille pour les adeptes de toutes les herbes magiques de la planète. Je comprends leur bonheur, je partage leur joie. (59)

Etrange, étrange... Gabriel semble apprécier les vacances alors qu'on avait cru comprendre qu'il était tout le temps en vadrouille...
Il repensa à la dispute avec Cheryl, qui voulait rester à Paris tout l'été. Parce qu'avec tous les touristes qui peuplent la capitale, ça allait rapporter gros. Enervé par la température, il avait proposé de prendre quinze jours en Bretagne, vers le début septembre. (...) Elle avait ricané, prétextant la rentrée des classes, les deux mois d'anarchie capillaire, qu'elle devrait remettre en ordre. Le ton était monté. Et pour finir, Gabriel, qui ne rêvait que de vagues et d'eau fraîche était parti, en rogne et en nage. (19)

A part çà, il n'aime ni les loups ni les falaises, va savoir Charles...
Les falaises, il s'en méfiait doublement. D'abord, parce que les poulpes en général les détestaient au nom d'un réflexe ancestral qui leur venait de Nouvelle-Calédonie. Quelques générations des leurs y avaient, en effet, été victimes de projectiles lancés du haut d'escarpements pour les dénicher sous l'eau avant de les transpercer de part en part avec des lances. Mais aussi de façon, plus personnelle, parce qu'il avait encore en mémoire cette nuit non loin de Pourville où, agressé par deux porte-flingues, il avait durement chuté au bas d'un à-pic. (92)


Le poulpe aime l'odeur et l'atmosphère des gares (119)


Côté sexe, il semble largement hétéro sauf que une fois...
Une fois, quand il était plus jeune, autant dire dans une autre vie, le Poulpe s'était laissé tâter le terrain homosexuel. Par un Auvergnat dans un bar de Clermont (...). Le Thermomètre, ça s'appelait. Sur le coup, il n'avait pas du tout compris mais, quand le gars lui avait posé la main sur la cuisse avec grande fermeté, Gabriel avait saisi que c'était pas seulement pour vérifier qu'il n'avait pas de fracture du fémur. Pour ne pas mourir vieille fille, le poulpe avait embrayé.
La suite s'était passée aimablement dans le petit studio, sous un poster de Jim Morrisson. Le type avait pris son bonheur et Gabriel aussi. Mais c'est le petit déjeuner qui avait tout gâché. Lorsque l'Auvergnat sensible, sur la cruciale question du lait chaud ou froid dans le café, l'avait appelé "mon pigeon".(...)
L'homosexualité du Poulpe s'était donc satisfaite de cette seule expérience auvergnate. Depuis, lorsqu'on lui posait la question -enfin... surtout Cheryl qui s'y connaissait en questions chiantes-, il répondait :  "Peut-être pédé dans la tête mais c'est le cul qui suit pas". A part ça, le Poulpe était trop amoureux de l'humain pour ne pas en respecter toutes les singularités.
(48)


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