Au clair de la lune... Cheryl
Gérard
Maria
Vlad
Léon
Pedro
Raymond

Suivez le guide...



























































Comité poulpien : qui se cache derrière ?

Mise à jour :
10 mars 1999

Léon


Léon, c'est le chien de Gérard et Maria. En accord avec le client de base, il traîne son cul et sa gueule d'un coin à l'autre du resto. Ce qui distingue sûrement l'animal du client, c'est sa retenue.


Gérard aurait nommé son chien Léon rapport à Léon Blum (119)

Il laissa la balle glisser au sol avec dédain et se contenta de soupirer en remontant les babines en souvenir de générations passées et féroces dont il savait que, quoiqu'on en pense, les gènes lui avaient été transmises. (28)

Epileptique reconnu, le chien Léon faisait à terre sa part de boulot : il gênait le passage. S'il s'était mis à gambader entre les tables les habitués se seraient inquiétés de son état. (54)

Léon, le clebs local, un de ces bergers allemands de café paranoïaque à force d'être gentil le jour et féroce la nuit, un monstre pelé aux yeux légèrement voilés par l'âge, qui se tenait sur son cul près de la table de Gabriel, espérant le susucre interdit. Gabriel l'aimait un peu ce clébard, à force de le voir planté comme un sphinx tous les matins, alors qu'il avait une sainte horreur des chiens et des pigeons, les premiers beurrant consciencieusement les trottoirs de son arrondissement et les seconds bouffant les déjections des premiers. Il l'aimait bien, Léon, parce qu'il était comme une potiche intégrée au mobilier de son rade favori, un café qui fonctionnait, dans son appartement personnel, comme le salon ou la bibliothèque. (1)

Et puis du côté odeur, il semble avoir quelques lacunes :
Maria est chez le vétérinaire pour un détartrage complet. Commençait à y avoir des plaintes du voisinage rapport à son haleine. (100)

Ici, l'amour est réciproque, puisque Gabriel est incontestablement le client préféré de Léon :
"Léon, le clebs, qui n'aime pas les casques, l'accompagne jusqu'à sa mob, les babines sorties comme des aubergines à l'étal des Quat'Saisons." (9)

Cependant cet amour n'est pas exclusif. Il n'y a à peu près que Gwendoline, délicieuse chienne berger belge (d'une non moins délicieuse maîtresse vendeuse de soutiens-gorge), pour le mettre dans tous ses états :
Léon était allongé sur le dos les papattes en l'air et couinassait doucement tandis que Vlad lui égouttait un peu d'eau fraîche sur le visage en faisant "meuh non meuh non". (...)
Depuis que Léon avait découvert Gwendoline, il y a deux ans, les mêmes symptômes alarmants se produisaient à chaque fois qu'il la voyait passer, de sorte que Gérard avait dû établir un accord avec madame Renée pour éviter à son chien des crises d'apoplexie comme celle-ci.
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Léon avait eu sa période anarchiste dans le quartier, Front de libération canine avec le bâtard du Cercle bleu et Rex du Vizir, ils renversaient les poubelles de fer, haine de l'uniforme et escapade jusqu'aux abattoirs de la Villette, ils défendaient leur rue contre les domestiqués du Canigou. Mais maintenant Rex était mort, écrasé par un 4X4, Cercle bleu avait laissé place à Big Burger, et, lui Léon n'avait même plus un grognement contre les caniches et péki-chiwawas qui passaient dans les bras de leurs maîtresses à hauteur de devanture. Le pire avait été quand il avait senti et vu de ses yeux vu, un chat de gouttière coupé, un collier au cou venir se frotter à son coin de restaurant . Génération de tatoués. Il eut envie de vomir au pied du Poulpe, mais ça puait trop la sciure et le mégot, il chercha de la truffe le sucre interdit, en attendant une mort prochaine. Vlad passa la tête hors de la trappe de la cave, il découvrit le Poulpe à quatre pattes donnant un sucre à Léon. (31)

Un épisode entier n'aurait pu se produire sans Léon en guest-star : Comme un coq en plâtre. Si Gabriel n'avait pas glissé, comment Cheryl aurait-elle fait pour prendre sa quasi indépendance! Et si Vlad n'avait pas été prise d'une furieuse envie de préparer du poulpe. Et si et si. Et si ma tante en avait, nous savons, nous savons...
Puis Gérard fit une drôle de tête, annonça qu'il revenait de suite et fila aux cabinets. L'oreille attentive de Léon avait surpris les gargouillis inquiétants produits par le ventre de son maître et le moyen de sa vengeance se profila. Il attendit que Gabriel et Gérard soient installés face à face au bureau de Gabriel, la table de gauche en entrant sur la terrasse et geignit un moment devant la porte jusqu'à ce qu'un client le fasse sortir. Il partit en trottinant jusqu'au croisement de la rue Popincourt où il commença à chier de longues traînées de merde jaune, un chien qui avait toujours fait dans le caniveau, cité en exemple dans tout le quartier.
Mais pendant ce temps, le Poulpe, que Nelly avait prévenu du massacre imminent, avait quitté le Pied de Porc, sans songer dans la panique, à regarder où il mettait les pieds, suivi par un Léon goguenard qui n'avait pas imaginé que les circonstances lui seraient aussi favorables.
Effectivement, apercevant la frêle Cheryl face à la troupe menaçante, Gabriel accéléra, sa semelle trouva sans la chercher une traînée jaunâtre et diarrhéique (Léon avait bien léché les restes de la sauce roumaine) qui ne lui porta pas bonheur car il partit dans un vol plané incontrôlé qui le laissa grimaçant de douleur, l'impression qu'on lui avait planté un épieu dans la cuisse, ligaments déchirés. Avant de s'évanouir sous l'effet de la douleur, Gabriel eut le temps de crier à Cheryl :
- Appelle Delrieu.
Léon, lui, fila, la queue basse.(...)

Léon avait entendu. Il soupira. Les hommes ne connaissaient pas ce tourment où l'on n'a même plus de sympathie pour soi-même. Le Poulpe ne venait plus. Le Poulpe était mort et Léon en était la cause et lui seul le savait. Ses entrailles se resserrèrent un peu plus et il plia les oreilles.

Une mouche s'était posée sur la truffe de Léon qui prit aussitôt le pari qu'elle n'y resterait pas. Pas la peine de s'en occuper soi-même, après tout elle avait bien le droit à une petite bronzette, elle aussi. Il sourit intérieurement en voyant s'inscrire dans son cerveau limité l'image d'un insecte volant, lunettes de soleil et ailes pleines de crème, affalée dans un transat. La mouche s'envola. Satisfait, il se laissa repartir dans la vacuité qui lui était habituelle mais le bourdonnement de l'intruse l'irritait. Elle cherchait la bagarre ? Il redressa l'oreille droite où la mouche s'était enfilée lui produisant un chatouillis extrêmement désagréable. La porte du café s'ouvrit sur un curieux martèlement et cette odeur... Le coeur de Léon lui remonta dans la bouche. Soulagement et crainte mêlés. L'affolement de son système nerveux l'empêcha d'entendre l'exclamation ravie de Gérard :
- Gabriel ! Attends, je vais t'aider.
Oeil sournois, oreilles rabattues, jambes fléchies, Léon tâcha de filer discrètement vers la cuisine en faisant un grand détour par-dessous les tables de droite mais un bâton comme il n'en existait que dans les histoires, que sa mère lui racontait autrefois, de chiens battus par des fermiers irascibles, se posa sur son cou et arrêta net sa fuite. La bonne nouvelle c'est qu'il n'avait pas tué Gabriel, la mauvaise, c'est que le Poulpe était revenu se venger.
Une main s'abattit sur son front, pour l'immobiliser sans doute, puis descendit fourrager dans le cou. Il entendit les mots incompréhensibles :
- Salut l'empaffé. Ça fait plaisir de te revoir.
La main indéniablement chaleureuse, quitta son échine, un petit coup de bâton léger la remplaça:
- Allez, sans rancune.
Léon devina plus qu'il ne comprit le pardon accordé. Sa grande queue balaya le sol, heureusement propre, dans un mouvement rapide et incontrôlable. Son coeur s'agita joyeusement dans toute sa poitrine et il partit, guilleret, étancher sa grande soif. "Ah les bons amis" pensa-t-il donnant libre cours à son penchant typiquement canin pour une vision du monde à la Comtesse de Ségur.
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