la vidéo sur Internet

on y croit

olivier roumieux - novembre 2001 (Archimag)

La vidéo sur le micro, c’est pour bientôt. En tout cas les principaux acteurs du marché en sont convaincus. Petit tour d’horizon des potentialités et des écueils de cette technologie tant attendue.

Exit Nouvo.com, dépôt de bilan pour le pionnier Canalweb, le moral n’est pas franchement au plus haut dans les rangs des WebTV (chaînes de télévision sur l’Internet). Pourtant, malgré de sérieux freins technologiques ou financiers, la vidéo sur Internet a au moins trouvé de nombreux domaines d’application et d’utilisation. Le commerce électronique, pas très en forme lui non plus, devrait tirer pleinement parti de présentations filmées de produits. La "vidéo à la demande" est un concept qui languit depuis cinq ans. Des WebTV, comme Alatele.com, s’efforcent d’inventer ces nouveaux programmes que l’on pourra pleinement déguster sur le "très petit écran" du PC. Les services d’information des chaînes de télévision traditionnelles jouent la complémentarité en exploitant l’immédiateté du média Internet, comme ce fut le cas lors des attentats de septembre dernier aux Etats-Unis.

le gisement du B to B

La vidéo devrait également trouver une place de choix dans les nouveaux services de e-learning qui sont en train de se mettre en place. Mais c’est dans le BtoB (business to business) que le marché du Webcasting, la diffusion de flux vidéo ou audio via Internet, devrait exploser.
On en reste malgré tout à l’heure actuelle sur le plan des potentialités et des conjectures. Les acteurs du domaine se veulent néanmoins optimistes, comme en témoigne la dernière étude d’Andersen sur le Webcasting (1). Selon cette enquête, 76 % entreprises interrogées estiment que la visualisation de flux vidéo connaîtra une croissance comprise entre 100 % et 400 % à l’horizon de deux ans. Le BtoB est actuellement la valeur sûre, puisque 60 % des diffuseurs réalisent plus de 80 % de leur chiffre d’affaires dans ce secteur. Les contenus de formation (e-learning) devraient connaître la plus forte progression (69 %), toujours selon les entreprises interrogées ! Les offres grand public ne seraient que différées, avec l’idée d’élaborer des programmes bien ciblés sur des communautés thématiques. Peu de surprises sur la nature des contenus appelés à se développer dans les deux ans : le cinéma, la musique et le sport ; ni sur ceux qui généreraient le plus de revenus : les contenus pour adultes, le sport et le cinéma.
Les acteurs du domaine affichent donc un relatif optimisme, qui pourrait même laisser penser qu’ils sous-estiment des obstacles technologiques pourtant bien identifiés.

si le débit est bon

Quelques petits rappels technologiques s’imposent donc. Le premier mode de diffusion de la vidéo sur l’Internet a été le télédéchargement de fichiers que l’internaute lit ensuite sur sa machine grâce à un logiciel auxiliaire. Le second mode, le streaming, consiste à envoyer au micro-ordinateur de l’internaute des flux réguliers qui sont lus en continu. Si le débit est bon, les premières secondes de la vidéo seront lues tandis que la machine continuera à recevoir les flux suivants. Or, le débit n’est pas bon. Ou plus exactement il n’est pas encore adapté à transmettre de la vidéo. Quand on sait qu’une vidéo au format MPeg 2 (Moving Picture expert group, le format adapté à la retransmission télévisée numérique) réclame en moyenne un débit de 3 Mbits/s et que son équivalent dégradé, le MPeg 1, en demande 1,2, on comprend que les modems à 56 Kbits/s ne suffisent pas. Et le haut débit, que ce soit via le câble ou la technologie ADSL, ne se développe pas assez vite en France. Pour exemple, France Télécom, le leader dans le domaine – le principal fautif pour certains –, revendiquait au mois de septembre 250 000 abonnés aux services haut débit de Wanadoo, dont 40 000 au câble.
Pour pallier ce problème de "tuyauterie" ont été développés des logiciels adaptés au streaming, compressant les flux pour une meilleure diffusion. Le pionnier en la matière est Real Networks avec le format Real Video, suivi du Quick Time d’Apple et de Windows Media de Microsoft. Trois formats bien évidemment incompatibles, qui obligent les diffuseurs à composer : 86 % des acteurs, selon l’étude d’Andersen, prévoient d’encoder leurs contenus au format Real dans les deux prochaines années contre 79 % dans le format de Microsoft et 50 % dans celui d’Apple. Se joue à l’heure actuelle entre Real et Microsoft une bataille digne de celle qui a opposé le second à Netscape dans le domaine des navigateurs.
Autre palliatif en attendant le haut débit, les Content delivery networks (CDN), du type d’Akamai ou d’Inktomi, déploient leurs serveurs de cache et répliquent les vidéos en des milliers d’exemplaires à travers le monde (notamment chez les fournisseurs d’accès) afin de les rapprocher de l’internaute. Une technologie qui permet en outre de mieux gérer les brutales montées en charge dues aux soubresauts de l’actualité.

l’enjeu des contenus

Bien évidemment, les tuyaux ne sont pas les seuls garants du développement du webcasting. Encore faut-il avoir des contenus à leur confier. Ce qui redonne des perspectives aux logiciels de traitement de la vidéo. Manreo est une jeune société française qui développe la gamme Hypercast : du découpage à la diffusion, en passant par l’indexation des séquences, ses différents modules permettent d’adapter la diffusion de vidéos sur de multiples supports (Internet / intranets, bornes interactives, cédéroms, ou encore ordinateurs de poche), sous forme de présentations Rich media. Selon Cécile Leveaux, directrice des projets de Manreo, « De nombreuses entreprises ont déjà un catalogue de médias et ne savent pas l’exploiter, pourtant ce sont bien les catalogues électroniques qui vont se développer sur l’Internet. » Selon elle, la grande rupture vient de la numérisation des documents sonores et vidéos, apparue au milieu des années quatre-vingt dix dans les entreprises du secteur de l’audiovisuel et actuellement en train de se généraliser à toutes les grandes entreprises. Les coûts sont devenus abordables, ce qui a fait exploser la production en interne et suscité de nouveaux besoins. D’autant plus que nous sommes entrés dans une ère d’ « indus-trialisation des processus », dans laquelle il faut produire plus tout en minimisant les coûts. Hypercast a donc été développé dans cette optique d’exploitation optimale des contenus de l’entreprise.
Le Rich media n’est en fait que la combinaison de vidéos avec du son et du texte. Dit comme cela, ça n’a l’air de rien, pourtant la combinaison synchronisée de fichiers MPeg, avec des graphiques et des commentaires en Powerpoint, par exemple, peuvent donner des résultats saisissants. Prudence toutefois, ce n’est que par l’interactivité et l’actualisation des informations – des fonctions très coûteuses - que le Rich media pourra connaître un sort meilleur sur les réseaux que sur les cédéroms. Pour cette raison, les acteurs affûtent leurs "business models" et remettent en cause le modèle de la gratuité financée par la publicité : 37 % des acteurs interrogés par Andersen estiment que ce mode de financement ne sera appliqué qu’aux événements diffusés en direct ; 38 % envisagent l’abonnement pour les retransmissions en différé et 43 % le paiement à l’acte pour les télédéchargements sur micro-ordinateurs.

(1) "Les perspectives du Webcasting", enquête réalisée entre les mois de juin et d’août derniers, à partir d’un questionnaire adressé à 520 entreprises françaises couvrant l’ensemble des métiers de la chaîne de valeur du Webcasting.

+ loin sur Internet

- les WebTV
ComFM, annuaire recensant notamment 415 chaînes de télévision et 3 689 radios sur le Net, à travers le monde.
www.comfm.fr

- Olivier Roumieux, page créée le 9 mai 2005 -

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