Idéliance

lier connaissances

olivier roumieux - octobre 2001 (Archimag)

Quand une belle idée part à la rencontre du marché, cela ne laisse guère indifférent. Idéliance fait partie de ces logiciels fondés sur un concept novateur, donc pas forcément très simple à expliquer : l’être humain demeure l’acteur principal de conception et d’exploitation de la connaissance. Facile à dire, un peu moins à mettre en pratique.

Conçu autour d’une idée très originale - c’est l’individu qui est porteur de connaissances et non la machine - Idéliance est un logiciel tout à fait excitant. Plutôt que de s’appuyer sur des technologies de recherche très complexes pour retrouver l’information, Idéliance préfère s’intéresser à l’"avant" : la formalisation des connaissances par leurs détenteurs. Une connaissance sera d’autant plus facilement restituable qu’elle aura été correctement formalisée lors de son entrée dans le système d’information. Comme une connaissance peut s’apparenter à une masse d’informations intégrées selon une certaine perspective, Idéliance exploite le concept de relations entre des bribes d’informations. Ce que l’on pourrait appeler familièrement « l’association d’idées ».

intelligence artificielle

Cette conception du système d’information est issue des travaux de deux chercheurs en intelligence artificielle : Jean Rohmer et Sylvie Le Bars, respectivement actuels président-directeur général et directrice générale de la société Idéliance. Comme toutes les bonnes idées, Idéliance met du temps à faire son chemin : développé au milieu des années quatre-vingt dix comme un outil personnel de saisie de ses informations, le produit trouve progressivement sa voie parmi le marché. Idéliance se définit aujourd’hui comme un outil de capitalisation des connaissances au sein de l’entreprise. Il fonctionne pour cela en intranet. Pourtant, ses concepteurs demeurent réticents à ranger leur solution dans les rayons du knowledge management : « Aujourd’hui, quand on parle de KM, on ne pense qu’au documentaire, explique Sylvie Le Bars, alors que nous nous intéressons principalement à l’information structurée. » Toujours selon elle, Idéliance serait plutôt à situer entre le datawarehouse, dans lequel on pose des questions relativement uniformes, et le portail d’entreprise qui offre une vue informationnelle de l’entreprise, mais ne permet pas de poser de questions.
Toute information peut se réduire à un sujet mis en relation avec un autre sujet. Une collection dans Idéliance est une base de connaissances qui renferme donc de multiples sujets mis en relation. L’exploitation de ces relations permet de déduire des connaissances difficilement discernables dans un système de bases de données traditionnel. L’alimentation d’une collection Idéliance consiste essentiellement à saisir des "énoncés" qui mettent en relation des sujets. Posons par exemple que « Olivier Roumieux est journaliste spécialisé », « Charlotte Perrin est journaliste spécialisée » (1), « Olivier Roumieux travaille pour Archimag », « Charlotte Perrin travaille pour Archimag ». Nous pouvons en déduire que « Archimag emploie Olivier Roumieux et Charlotte Perrin, qui sont eux-même journalistes spécialisés ». Car dans Idéliance, toute relation est inversée systématiquement : à A « travaille pour » B correspond ainsi B « emploie » A. L’exemple est évidemment simpliste, il n’en démontre pas moins le fonctionnement du logiciel Idéliance : l’émergence de connaissances par recoupement d’informations apparemment distinctes et pourtant proches par certaines de leurs caractéristiques. Idéliance réhabilite la relation comme élément créateur de sens dans une base de connaissances. En découle tout naturellement une myriade de réseaux sémantiques exploitables.
Chaque sujet peut être visualisé sous la forme d’une fiche synthétisant l’ensemble de ses relations. L’utilisateur peut évidemment entrer un commentaire spécifique pour chacun des sujets.

gestion de compétences

Au-dessus des unités que sont les énoncés se trouvent les catégories. Celles-ci agrègent les énoncés sémantiquement proches, en s’appuyant pour ce faire sur un énoncé référent. Tous les énoncés qui contiennent au moins un sujet de l’exemple sont classés dans sa catégorie. Ce qui ne veut pas dire que chaque sujet appartienne à une seule catégorie : Olivier Roumieux, outre le fait qu’il se range dans la catégorie des « journalistes spécialisés », peut en effet très bien se retrouver dans celle des « amateurs de romans policiers ». Où l’on perçoit déjà très clairement un des champs possibles d’application d’Idéliance, la gestion des compétences dans une communauté.
Mais l’on peut aussi mettre en relation des sujets avec des données, des informations certes importantes, mais qui ne méritent pas de devenir elles-mêmes des sujets. Idéliance gère comme types de données les dates, les adresses électroniques, les adresses web, les liens vers des fichiers externes à la base, comme des fichiers de traitement de texte et enfin des valeurs qui ne ressortent d’aucune des catégories précitées.
En réseau, une collection Idéliance doit être gérée avec rigueur. L’administrateur organise grâce au module "Entreprise" une première trame de formalisation a priori. Tous les utilisateurs sont gérés avec leurs droits, mais l’on ne peut pas encore s’interfacer avec un annuaire d’entreprise, faute de compatibilité LDAP (2). Les droits portent à la fois sur les collections - à qui sont-elles accessibles - et les personnes, organisées en groupes - qui a le droit de faire quoi. L’administrateur gère les relations et les catégories, les utilisateurs n’ayant pas à en créer eux-mêmes si le modèle de connaissance a été correctement formalisé.
Du côté utilisateur, sont disponibles deux modules : Webscript pour alimenter et consulter les collections et Webvision qui ne permet que la consultation. A tout énoncé correspond un auteur, celui qui le formule, et des destinataires, ceux habilités à l’exploiter. La formulation des énoncés se fait par un écran composé de zones et de menus déroulants : la catégorie du sujet, l’intitulé du sujet, la relation et le complément. A l’exception de la relation, ces listes ne sont pas fermées, elles proposent ce qui a déjà été saisi. Outre l’alimentation de collections au format natif, Idéliance récupère également des bases extérieures, issues de SGBD-R (Systèmes de gestion de bases de données relationnelles), par l’intermédiaire du format texte tabulé.

questions non formulées

Si le mode de saisie des informations distingue déjà Idéliance de l’offre existante, les multiples types de consultation ouvrent des horizons tout à fait novateurs. Le premier type est sans contexte le plus conventionnel : une zone permet de rechercher une chaîne de caractères dans l’ensemble des sujets d’une collections, ou dans seulement certaines catégories. A partir de ces sujets de départ, l’utilisateur peut ouvrir une fiche, puis naviguer librement de relations en relations. L’intérêt d’un tel "butinage" est de pouvoir parcourir une base de connaissance de façon transversale, d’établir des rapprochements sans avoir à les expliciter a priori, de trouver des réponses à des questions non formulées. Un processus qui s’avère souvent anecdotique, mais qui parfois permet de retracer la genèse d’une idée. Idéliance offre également des possibilités - encore restreintes - de représentation graphique des dépendances entre sujets et catégories. Une limite qui devrait être levée avec le prototype en cours de développement.
Une fois obtenu un lot de réponses - de "sujets" - pertinents, il est possible d’enregistrer la requête ainsi formulée, pour la réutiliser ultérieurement, dans une démarche de veille. L’utilisateur peut "filtrer" cet ensemble de sujets par d’autres relations, afin d’affiner progressivement sa requête.
Le "Quoi entre" est une autre fonction intéressante qui permet à l’utilisateur de visualiser - sous forme de tableau ou de graphique - les relations qui unissent deux sujets qu’apparemment rien ne rapproche mais qui font partie de la même collection. Une façon pour Marc et Robert de découvrir leur passion commune pour la Callas ou, plus sérieusement, d’étudier ses propres rapports avec son environnement concurrentiel.
Plus complexe encore, le "tableau croisé" permet de donner une vue synthétique des relations qui unissent trois catégories de sujets : dans les cases, en titre de colonne et en titre de rangée.
Grâce à ces différents outils de tri, l’utilisateur constitue des "extraits" de collection regroupant des sujets et leurs relations, selon une profondeur de "voisinage" définie. Les extraits sont ensuite publiables : au format natif d’une collection Idéliance (.col), au format du tableur Excel, ou encore en HTML (Hypertext markup language) pour publication sur le Web ou en intranet.

(1) La formalisation des énoncés impose une certaine rigidité grammaticale.
(1)(2) Lightweigh directory access protocol, un protocole de standardisation des annuaires d’entreprise.

configuration et prix

En réseau, Idéliance s’installe sous Windows NT et 2000. Le portage de l’application sous Linux est prévu pour l’année prochaine.
Idéliance Expert (monoposte) : 3 000 € (19 680 F)
Idéliance Entreprise (serveur) : 6 000 € (39 360 F)
Idéliance Webvision (consultation) : 1 000 € (6 560 F)
Idéliance Webscript (saisie et consultation) : 2 000 € (13 120 F)

l’avis d’Archimag

Bien qu’issu de travaux de recherche de plusieurs années, Idéliance est encore un produit commercialement jeune, puisque sa version 1.1 est sortie en février dernier. Sur le plan technique également, quelques développements devraient donner de l’épaisseur au produit. Il s’avère en outre relativement coûteux, que ce soit en monoposte ou en réseau. En revanche, le concept qui sous-tend le produit est tout à fait brillant et devrait enthousiasmer nombre d’experts blasés. Chaînon manquant d’un système d’information encore trop centré sur le document, Idéliance représente un moyen de concrétiser l’entrée de son service, de son entreprise - ou bien encore de sa documentation personnelle ! - dans la gestion des connaissances, de l’amont à l’aval. Sur le plan des applications, le potentiel semble considérable. Comptons sur les premiers clients (l’Oréal, les laboratoires Lipha, la Gendarmerie nationale…) pour inventer à leur tour les futurs usages de ce logiciel à part.

- Olivier Roumieux, page créée le 1er juillet 2001 -

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